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Dominique Lebrun

Depuis trois ans, le “Monsieur Vélo” du gouvernement, c’est lui. Nommé le 28 décembre 2011 par décret présidentiel, le successeur d’Hubert Peigné nous livre son regard sur sa fonction et la façon dont elle a aiguisé ce regard.

Créée par décret du Premier ministre le 14 avril 2006, la fonction de coordonnateur interministériel pour le développement de l’usage du vélo s’inscrit dans la droite ligne du Comité de suivi de la politique vélo, né en 1994. Juriste de formation, premier adjoint à la mairie de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine) et familier des cabinets ministériels depuis 1986, Dominique Lebrun n’avait pas encore eu sa Pause vélo. Une anomalie désormais réparée.

  • L’un des mots clés de votre fonction est le terme “intermi-nistériel”. Pourquoi ?

Le vélo a ceci de particulier que, selon l’angle sous lequel il est abordé, il touche autant aux prérogatives des transports, des routes, de la sécurité routière, de la santé, de l’environnement, du tourisme voire, si vous vous placez par exemple dans la perspective de l’engin, de l’industrie. Or chacun de ces domai-nes relève souvent de ministères distincts. Les termes “interministériel”, mais aussi “coordon-nateur”, attachés à la fonction trouvent donc ici pleinement leur justification.

  • Quelle était la situation du vélo en France lors de votre nomination ?

D’abord je tiens à préciser que nous ne sommes pas partis de rien. Il y a une vraie volonté de l’État depuis le début des années 2000 et la création d’un poste de coordonnateur interministériel. J’ai succédé à Hubert Peigné fin 2011 / début 2012, et mon action s’inscrit dans cette continuité. Le gouvernement issu de l’élection présidentielle de 2012 a ensuite amplifié cette démarche jusqu’à déboucher en 2014 sur l’adoption du PAMA , le Plan d’action pour les mobilités actives, qui est le fruit d’une concertation large, avec notamment les DRC , le Club des villes et territoires cyclables et la FUB.

  • Qu’avez-vous découvert en approfondissant ces questions ?

J’ai découvert des acteurs très impliqués derrière chaque association et institution. Leur enga-gement est un acte sincère et profond, avec cette prise de conscience des enjeux de l’épo-que concernant le devenir de notre planète. Or il y a souvent loin de la parole aux actes et, à cette aune, le vélo vaut mille discours. C’est un geste conscient, concret, qui peut être pratiqué quelle que soit la catégorie sociale.

  • Quels sont les leviers majeurs pour développer l’usage du vélo, selon vous ?

D’abord, il importe de mesurer le fait que les gens veulent avant tout sécuriser leurs déplacements et leur stationnement. L’État a un rôle à jouer en incitant à la construction de parkings dans les immeubles d’habitation, de bureaux et dans les lieux publics. Un autre aspect est souvent mésestimé : l’appréhension. Beaucoup seraient enclins à reprendre le vélo si la chaussée était mieux sécurisée. De la même manière, nombreux sont ceux qui ont besoin de réapprendre à faire du vélo. Nous travaillons donc avec l’Éducation nationale et avec les associations pour développer
l’apprentissage et mettre en place des certificats de qualification d’éducateurs vélo.

  • Quid du partage de la route ?

C’est un autre enjeu fondamental. Il y a une prise de conscience de la nécessité de partager la route, mais la question du différentiel de vitesse reste à régler. Même avec la meilleure volonté du monde, il n’est pas possible d’aménager des itinéraires vélo partout. Réduire les vitesses est une des conditions d’un meilleur partage de la rue. Cela va de pair avec le double sens cyclable et le cédez-le-passage au feu, qui étaient des mesures encore critiquées ou mal comprises il y a trois ans.

  • Gardez-vous un œil sur ce qui se fait dans les pays voisins ?

Il est essentiel de comparer et mettre en perspective ce que nous faisons en France. Tout le monde cherche des solutions. Ce que nous faisons aujourd’hui a souvent déjà été engagé ailleurs, parfois depuis longtemps, puisque les pays du Nord ont fait leur aggiornamento il y a une quarantaine d’années. Les fréquents pics de pollution mesurés en ville sont là pour nous rappeler qu’il est temps d’agir.

  • Vous déclariez dans un précédent entretien être un enfant du Tour de France. Comment articulez-vous cette passion de jeunesse avec vos fonctions actuelles ?

Je pense qu’il y a trop souvent eu une coupure entre le vélo du quotidien et le cyclisme de compétition. Pour ma part, je crois en la sociabilité du vélo. Tous les cyclismes sont complémentaires et l’image favorise la pratique du vélo. Il y a une esthétique de l’effort, et cette esthétique peut susciter l’envie. Il ne faut pas oublier que, si la France est la deuxième destination touristique du monde, elle le doit aussi au rayonnement planétaire d’épreuves cyclistes comme le Tour de France. Le vélo est un de nos atouts, utilisons-le en tant que tel.

  • Quels sont les grands chantiers qui vous attendent dans un futur proche ?

Ils sont nombreux. Il faudrait citer l’intermodalité, les incitations économiques, le statut de la voie verte, l’aménagement urbain, toutes les formes de communication autour des bienfaits de la marche et du vélo… L’implication des collectivités et le succès d’itinéraires comme La Vélodyssée© ou La Véloscénie© confirment que le processus est enclenché. À chacun maintenant de mettre le grand braquet !

Anthony Diao

Vélo & Territoires, la revue