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Le fluvestre : un atout pour le vélo ?

Extrait de Vélo & Territoires 47

Voies navigables de France et les Départements & Régions Cyclables se sont associés en septembre 2016 pour travailler ensemble au dé-veloppement du vélo le long des voies d’eau. Résultat ? Une première journée nationale sur le tourisme fluvestre organisée à Paris le 27 mars. Éclairages.

Croisière, loisirs nautiques, randonnée pédestre, itinérance à vélo… Le tourisme fluvestre con-cerne l’ensemble des activités liées à une prati-que sur la voie d’eau et/ou ses abords. De fameuses véloroutes sont d’ailleurs le fruit de l’association du fluvial et du cyclable : La Loire à Vélo, le Danube à Vélo, le Canal des 2 Mers à vélo, etc. Côté tourisme fluvial, la pratique du vélo pendant le  séjour est également courante. Il s’agit d’un bon moyen de découvrir le patrimoine, les paysages ou les richesses locales, via une offre de circuits à vélo à proximité de la voie d’eau, d’une halte ou d’un appontement. Des offres de séjours combinés, alliant bateau et vélo, se développent également.

Un partenariat facilitateur

Dans ce contexte d’attractivité mutuelle, Voies navigables de France (VNF), établissement public administratif, gestionnaire du domaine public flu-vial, et les DRC, réseau de collectivités pour le développement des politiques cyclables et des véloroutes et voies vertes, ont signé en sep-tembre 2016 une convention de partenariat. Le but est d’améliorer les connaissances sur le lien entre vélo et voie d’eau, mais aussi de faciliter les interactions entre les acteurs du fluvial et du cyclable, de soutenir le tourisme fluvestre – avec une attention particulière à l’offre de services adaptée aux fluviaux et aux cyclistes -, et l’émergence de destinations d’excellence. Six mois après le lancement de ce partenariat, VNF et les DRC ont organisé le 27 mars 2017 à Paris la 1re journée nationale sur le tourisme fluvestre. Présentations d’initiatives vertueuses et innovantes, débats sur la mise en marché du fluvestre ou sur les modèles de gouvernance de ce type de projets, mise en réseau des acteurs : la journée a confirmé la pertinence de cette thématique et l’intérêt de renforcer le lien entre fluvial et cyclable.

Chiffres

87 % des 9215 km du réseau VNF (navigable et non navigable) disposent d’un itinéraire cyclable national à moins de cinq kilomètres. Mieux : en prenant en compte les itinéraires inscrits à des schémas régionaux, la quasi-totalité des emprises VNF sont dotées d’itinéraires vélo à moins de cinq kilomètres. Côté vélo, la proportion est moindre car le territoire national est inégalement doté d’emprises VNF. Elle reste tout de même significative puisque 38 % des itinéraires cycla-bles nationaux se situent à moins de cinq kilomètres soit 8000 km du réseau VNF. Pour les véloroutes européennes, la part est de 45 %, c’est-à-dire plus de 3600 km des 8000 km qui  concernent la France, sont situés à moins de 5 km d’une emprise VNF. 61 % de ces 3500 km d’EuroVelo sont aujourd’hui réalisés. Un taux d’avancement important, mais inférieur à la moyenne nationale de réalisation des itinéraires EuroVelo (77 % en 2016). L’objectif des DRC est d’achever les 8000 km d’EuroVelo en France d’ici 2020. Pour ce qui est des itinéraires inscrits au Schéma national, ils sont réalisés à 44 % soit près de 3500 km. Là encore, le taux d’avancement des itinéraires inscrits à proximité du réseau VNF est inférieur au taux national (62 % au 1er janvier 2017). La production de ces chiffres de 2016 est le fruit de la collaboration entre VNF et les DRC, qui a également permis de produire des outils cartographiques.  Faute de données de fréquen-tation fluvestre à l’échelle nationale à ce jour, les retombées économiques s’observent par pratique. Elles sont estimées à au moins 500 millions d’euros par an pour le tourisme fluvial et à 2 milliards d’euros pour le touris-me à vélo en France. Des études flu-vestres ont été menées sur certains territoires sans pour autant permettre à ce jour de comparer véritablement les volumes et les retombées [voir ci-contre l’infographie issue de l’étude de fréquentation fluvestre en Bretagne et Loire-Atlantique].

Les enjeux identifiés

Pourquoi est-il stratégique pour les acteurs du vélo de s’inscrire dans une logique fluvestre ? Quelle est la valeur ajoutée du fluvestre pour le développement du vélo et du tourisme à vélo en France et quels en sont les enjeux ?

ENJEU #1

Compléter le Schéma national des véloroutes et voies vertes
Sur les 8000 km d’itinéraires cyclables nationaux situés à moins de cinq km d’une voie d’eau, 56 % ne sont pas réalisés à ce jour. Plusieurs raisons peuvent l’expliquer : aménagements non-prioritaires pour les collectivités maîtres d’ou-vrage, contraintes réglementaires ou environnementales, programmations en cours, difficultés à faire émerger des partenariats, contraintes budgétaires… Il s’agit toutefois de projets pour lesquels la continuité foncière est déjà plus ou moins garantie grâce aux chemins de halage. Autre avantage : les voies d’eau constituent des pénétrantes très efficaces dans le tissu urbain, là où les coupures et les ruptures sont justement problématiques pour les véloroutes et voies vertes. Le recours à la Convention de superposition d’affectations, outil partenarial proposé par VNF aux collectivités pour l’ouverture des chemins de halage aux cyclistes, est le meilleur moyen pour soutenir l’ouverture d’itinéraires cyclables sur des emprises VNF. On dénombre aujourd’hui environ 350 conventions signées entre VNF et les collectivités locales pour des véloroutes. Accélérer l’avan-cement des projets de véloroutes et voies vertes en bord de voie d’eau est nécessaire pour sou-tenir la mobilité à vélo et le tourisme à vélo. Les DRC et VNF se sont rapprochés afin de travailler à une meilleure mise en réseau des acteurs et à une réflexion commune sur les conventions de superposition d’affectations.

ENJEU #2

Développer l’offre de services pour les cyclistes le long des voies d’eau
Les services adaptés au vélo sont attractifs et motifs de satisfaction pour les usagers. Ils peuvent prendre la forme par exemple d’un point de location de vélos, d’un stationnement sécurisé, voire d’un hébergement ou d’un lieu de restauration. Pour référencer les services adaptés aux cyclistes, la marque nationale Accueil Vélo se déploie en France depuis 2012. Début 2017, plus de 2700 établissements (hébergeurs, loueurs, sites de visite, restaurateurs, offices de tourisme, réparateurs) sont détenteurs de la marque. En matière de fluvestre, la polyvalence des lieux d’accueil est à développer avec le déploiement d’Accueil Vélo dans des structures fluviales comme les haltes ou les ports. La halte fluviale La Porte Verte de Fragnes, par exemple, est dotée de la marque. Elle propose des services de location de vélos, de petite réparation et de documentation touristique.
Des sanitaires, prises électriques et accès Wifi sont également accessibles aux touristes à vélo.

La sensibilisation des acteurs fluviaux aux besoins des cyclistes est primordiale. Le service doit certes être adapté mais, parfois, c’est son exis-tence même qui fait défaut. Comment lutter contre la désertification des commerces en zone rurale ? Comment redonner de l’attractivité et de la vie aux voies d’eau, parfois délaissées par l’activité quotidienne ? La requalification de maisons éclusières vacantes peut être une réponse. Certaines collectivités ont fait cette expérience à partir de diagnostics précis de l’existant et des besoins et la recherche d’occupants utiles au tissu local. C’est le cas par exemple du département de la Somme le long de la véloroute V30. VNF est également doté d’un patrimoine bâti important, qu’il tente de valoriser au travers d’appels à projets. Ces derniers gagneraient à davantage prendre en compte les potentialités touristiques et notamment cyclables au travers d’une stratégie plus globale.

ENJEU #3

Soutenir l’émergence de destinations fluvestres d’excellence
L’attractivité du tourisme à vélo bénéficie aux voies d’eau et vice versa. D’où l’intérêt des DRC à soutenir l’émergence de desti-nations fluvestres d’excellence. Cette approche revient à envisager la struc-turation d’une destination à l’échelle d’un territoire fonctionnel, avec un marqueur géographique fort : l’eau comme colon-ne vertébrale, ses abords comme ramifications. Alors que la mise en place de partenariats autour d’itinéraires cyclables, sous la forme de comité d’itinéraire, montre son efficacité depuis près de dix ans, deux questions se posent. Premièrement : comment l’expérience des comités d’itinéraire cyclable peut servir l’émergence de destinations fluvestres aux enjeux territoriaux forts et aux thématiques plus larges ? Deuxièmement : quelle place prend une véloroute, en tant que produit touristique, au sein d’une destination fluvestre ? Peut-elle être visible et attractive au sein d’une offre plus globale ? Dans le cadre de leur partenariat, les DRC et VNF envisagent de travailler de concert à la gouve-nance de projets fluvestres, au partage de bonnes pratiques en la matière, et à la prise en compte du fluvestre dans les comités d’itinéraire cyclable.

Fluvial et cyclable : destins croisés !

Condensée de patrimoine historique et culturel, faible dénivelé, axe stratégique reliant les pôles urbains entre eux, qualité paysagère, majorité de sites propres ou de voies à faible trafic : la voie d’eau est l’allié naturel du vélo. Forte d’un patrimoine de voies navigables exceptionnel en Europe et de sa position de deuxième destination au monde pour le tourisme à vélo, la France dispose d’un atout fluvestre majeur, avec une marge de progression importante. La France a besoin d’itinéraires cyclables de qualité le long des voies d’eau, mais aussi d’une signalisation adaptée aux besoins des cyclistes, orientant notamment vers les services touristiques à proximité ; elle mérite d’être visible à l’étranger et de proposer des produits cohérents et attractifs ; elle nécessite des services de gammes variées et réparties de façon homogène le long des voies d’eau.

Comme un symbole du mariage réussi du fluvial et du cyclable, des prestataires commercialisent des produits combinés. Ainsi, le touropérateur néerlandais Boat-Bike Tours, actif depuis la fin des années soixante-dix, programme de mars à octobre 70 produits “Vélo et bateau“ dans 15 pays européens. En France, Boat-Bike Tours propose essentiellement Bordeaux, Paris, la Champagne et la Provence-Camargue, pour des tarifs compris entre 1000 et 2200€ la semaine. En France, La Bicyclette Verte commercialise aussi des offres « Vélo et bateau ». En France, Autriche, Italie et aux Pays-Bas, l’agence propose des circuits qui s’appuient sur de grands itinéraires cyclables, notamment EuroVelo, le long de voies d’eau. La démocratisation et la diversification de ce type de produits seront rendues possibles si un dialogue constructif est mis en place à l’échelle nationale et locale entre acteurs du fluvial et du cyclable. Une démarche dans laquelle les DRC et VNF sont engagés.

Témoignage d’Ophélie Barrière,

La directrice adjointe de la société Locaboat s’est exprimée lors de la 1re journée nationale sur le tourisme fluvestre, le 27 mars 2017 à Paris.


« Locaboat est une société française de location de bateaux 
habitables sans permis. L’entreprise gère 380 bateaux répartis sur 26 bases de location (dont 240 bateaux et 19 bases en France). Le vélo ? Il est le complément idéal de la croisière fluviale. Il peut en effet être embarqué facilement à bord, permet aux clientèles de découvrir le patrimoine et de s’approvisionner aux alentours de la voie d’eau, et peut enfin compléter l’offre d’activités d’une journée – la navigation ne durant que trois à quatre heures par jour. Locaboat dispose d’un parc de 900 vélos, avec 8000 locations réalisées en France en 2016. Quatre clients sur dix louent un vélo, sachant que d’autres viennent avec leur propre vélo sur nos bateaux. Au final, la location de vélos représente un complément de revenus non négligeable, avec un tarif de 40 € la location à la semaine. »

Pour en savoir plus : www.velo-territoires.org | page « Fluvestre »

Agathe Daudibon

Vélo & Territoires, la revue